Facturation électronique : relever le défi de la traçabilité et de la compétitivité

Le 10 juillet 2025 |
Dès septembre 2026, grandes entreprises et ETI sauteront le pas de la facturation électronique, ouvrant la voie aux PME, TPE et micro-entreprises qui les suivront à partir de septembre 2027. Avec cette nouvelle procédure de facturation, l’administration fiscale se dote d’un outil visant à endiguer la fraude à la TVA, mais contribue aussi à renforcer la compétitivité des entreprises françaises et la pertinence des politiques fiscales. Offrant des avantages indéniables, ce levier de transformation digitale soulève également de nouvelles questions, notamment liées à la protection des données des organisations.

Anticiper la transition vers la facturation électronique

 

En France, ce sont toutes les entreprises assujetties à la TVA qui sont concernées par le passage à la facturation électronique. Si certains secteurs utilisant des informations confidentielles y font exception (domaine de la défense ou de l’armement, domaine médical, certaines transactions dans les secteurs bancaires et assurantiels), la réforme se démarque donc par son vaste champ d’application. Déjà adoptée par l’Italie, ou l’Espagne, cette nouvelle procédure concernera tous les pays européens d’ici 2030. Pour les transactions réalisées en France, ce système de facturation est désigné par le terme « e-invoicing ». De leur côté, les opérations effectuées avec des acteurs établis en dehors du territoire et avec des particuliers passeront par le dispositif d’« e-reporting ». Le fonctionnement de ce mode de facturation implique l’utilisation d’un opérateur agréé anciennement Plateforme de Dématérialisation Partenaire (PDP), assurant l’envoi et la réception des factures entre les utilisateurs et la transmission de ces informations à l’administration fiscale. Prés de 100  « PDP » sont officiellement pré-immatriculées chacune répondant à des besoins spécifiques selon les secteurs d’activité.

Pour anticiper la transition vers la facturation électronique, il faut garder en tête que cette procédure implique des changements à deux niveaux : l’émission puis la réception des factures. Concernant l’émission, deux échéances sont à retenir : septembre 2026 pour les ETI et grandes entreprises, et septembre 2027 pour les autres types d’organisations. Toute entreprise effectuant des opérations avec des ETI ou des grandes entreprises doit toutefois être capable d’utiliser ce système dès septembre 2026 afin de recevoir les factures qui lui sont adressées. Même si les TPE et PME bénéficient d’un délai plus important, elles se doivent ainsi d’initier la mise en place d’un outil de facturation électronique dès que possible. Avant de se lancer, il est indispensable de diagnostiquer l’ampleur des flux transactionnels liés à l’activité de l’entreprise, afin d’évaluer la complexité du projet de transition. Taille, secteur d’activité, quantité et typologie de clients et prestataires peuvent effectivement influencer son niveau de difficulté. Par exemple, une entreprise de grande taille possédant peu de fournisseurs réalisera une transition moins chronophage qu’une entreprise de petite taille travaillant avec de nombreux prestataires.

 

Un triple objectif : entre transparence, compétitivité et croissance

En offrant une meilleure visibilité et une traçabilité sur les montants à collecter par l’administration fiscale, l’automatisation des contrôles constitue un outil efficace contre la fraude à la TVA. Face à la multiplication des cas de fraude à la présidence (usurper l’identité de la direction d’une entreprise afin d’extorquer de l’argent à ses collaborateurs), de fraude aux faux fournisseurs et aux faux RIB, l’utilisation d’une plateforme automatisée permet d’effectuer des contrôles croisés. En cas de facture frauduleuse, cette procédure garantit son rejet si elle ne peut être reliée à une entreprise répertoriée par l’administration fiscale. Au-delà de l’aspect répréhensif, la facturation électronique contribue également à la compétitivité des entreprises françaises en leur proposant une procédure moins coûteuse et plus efficiente.

Tous les services d’une entreprise peuvent en tirer des avantages, de la trésorerie au contrôle interne, en passant par la comptabilité : données actualisées et prévisions en temps réel, centralisation des informations et meilleure visibilité sur l’ensemble du processus, mise en évidence des risques et des points bloquants, etc. De façon générale, la digitalisation des flux de facturation limite les risques d’erreurs humaines ou de non-conformité, et diminue le temps nécessaire à la saisie ou à la recherche d’informations. Ce gain de temps permet alors aux équipes de se concentrer sur l’analyse et l’interprétation des données. Pour de nombreuses organisations, c’est l’occasion de pointer les axes d’amélioration possibles afin de faire évoluer les procédures, de mettre en place des stratégies plus pertinentes ou adaptées à de nouveaux besoins : bons de commande et de réception, optimisation de la séparation des tâches, etc. Enfin, à l’échelle nationale, visualiser les flux d’échanges réalisés sur le territoire permet à l’administration fiscale d’analyser tendances et fluctuations de façon plus réactive, et d’adapter ses politiques en conséquence. La croissance des secteurs apparaissant en difficulté peut notamment être soutenue par la mise en place d’aides spécifiques.

 

Comment garantir la protection des données ?

La traçabilité et la transparence offertes par ce système de facturation ouvrent toutefois la porte à de nouveaux types de fraudes. Les « PDP » rassemblant un grand nombre de données confidentielles sur un même support (identité des fournisseurs et des prestataires, montants des prestations, délais de paiement), il est indispensable de garantir à leurs utilisateurs qu’elles ne soient pas utilisées ni partagées à mauvais escient. A la signature d’un contrat avec la plateforme, il est important de spécifier que les informations fournies n’ont en aucun cas vocation à être utilisées à d’autres fins. Définir un périmètre d’utilisation précis permet notamment d’éviter que ces données soient utilisées à des fins commerciales, pour effectuer des études de marché ou encore des recherches comparatives.

 

Le passage à la facturation électronique impacte les entreprises à de nombreux niveaux. Bien plus qu’un enjeu de comptabilité ou de fiscalité, cette transition nécessite une préparation réfléchie, passant avant tout par la sensibilisation et l’intégration de l’ensemble des collaborateurs.

 

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